Anatomie et Yoga : BASE de l’article


6) Styles de yoga : intensité, codification, adaptation

Les séries codifiées et dynamiques comme par exemple celles de l’Ashtanga Vinyasa ou du Sivananda contiennent des postures exigeantes (comme par exemple Marichyasana I dans la première série Ashtanga). Dans leurs premières séquences, elles peuvent être rendue accessibles grâces aux adaptations proposées par de nombreux enseignants. Néanmoins, plus on progresse dans la série, plus certaines postures très physiques ou contorsions atteignent une limite d’adaptation : elles ne conviennent tout simplement pas à toutes les morphologies ni à toutes les histoires articulaires.

Illustrations de la Primary Series d’Ashtanga Vinyasa Yoga, Source : CSC Virginia
Illustrations de la Primary Series d’Ashtanga Vinyasa Yoga, Source : CSC Virginia

Illustration originale créée pour cet article, répresentant la série intermédiaire Sivananda
Image réservée

À l’inverse, les cours de type hatha doux, yin, ou orientés récupération sollicitent beaucoup moins ce registre d’effort et de contorsion. Ils mettent l’accent sur le relâchement, l’usage d’accessoires et la gestion fine de l’amplitude. De ce fait, ils sont souvent plus facilement accessibles, sans nécessiter de multiples variations.

C’est là toute la richesse de la diversité des styles :
chacun peut trouver une approche adaptée à son corps et à ses envies. Nous n’avons pas tous les mêmes souhaits ni les mêmes besoin dans notre pratique du yoga. Quand on débute et qu’on découvre un lieu multi-styles, il est normal de tester différents cours pour trouver ceux qui nous inspirent. L’essentiel est de se rappeler que certaines postures ne sont pas adaptées à tous, et qu’il est toujours préférable de respecter ses propres limites plutôt que de chercher à reproduire coûte que coûte une forme extérieure.

Les photos de véritables os partagées plus haut dans l’article illustrent parfaitement cette diversité : deux personnes ne feront jamais une posture exactement de la même manière, car leurs structures osseuses les y invitent différemment [9].


7) Le piège de l’ego

Certaines postures spectaculaires (jambe derrière la tête…) n’apportent aucun bénéfice fonctionnel universel. Si elles vous procure du bien-être, continuez. Mais si vous insistez contre une butée osseuse, vous prenez le risque de vous blesser. La qualité d’attention compte davantage que la forme extérieure. Et si une douleur s’installe ou revient sans cesse, le plus utile n’est pas un avis, mais de réaliser des examens médicaux adaptés (radio, IRM, etc.) pour comprendre réellement ce qui limite votre corps.

💡 À noter : certains discours associent certaines postures à des “libérations émotionnelles” localisées (par exemple les hanches comme lieu où seraient stockées les émotions). Ces explications relèvent davantage du langage symbolique que de données scientifiques. Si des émotions surgissent en pratiquant, c’est souvent simplement parce que l’on prend enfin le temps de ralentir et d’être à l’écoute de soi. Cela n’a rien de mystique.

Après avoir vu ce qui peut piéger (ego, discours pseudo-mystiques…) il reste une question centrale : comment pratiquer de manière constructive, sans se faire mal et sans tomber dans les excès ?


8) Pratiquer avec intelligence et bienveillance

Écouter les signaux du corps : distinguer la sensation juste (étirement, tonicité, respiration fluide) de la douleur ou de la lutte.

Respecter ses limites : certaines postures ne seront jamais adaptées à votre morphologie — ce n’est pas un échec.

Adapter si besoin : âge, antécédents médicaux (arthrose, SpA, chirurgie, etc.), fatigue du jour… tout cela fait partie de la pratique.

Utiliser les accessoires avec discernement : briques, sangles ou couvertures peuvent être de précieux soutiens, mais leur usage n’a de sens que s’il sert l’écoute et non la performance.

Photo : usage réservé, lieu : Université Populaire Européenne

Cette attention respectueuse est d’autant plus importante que nous n’avons pas tous les mêmes tissus ni la même souplesse naturelle, un point souvent méconnu que nous allons explorer maintenant.


Conclusion

On entend souvent :

« Ce n’est pas à vous de vous adapter au yoga, c’est au yoga de s’adapter à vous. »

C’est une phrase juste, mais encore trop abstraite si on ne l’étaye pas.

  • Les os ne sont pas tous identiques.
  • Les tissus non plus.
  • Les pathologies accentuent encore ces différences.

👉 La lucidité, c’est de reconnaître que tout n’est pas fait pour nous dans le yoga. Forcer, c’est courir vers la blessure. Insister pour “cocher une posture”, c’est nourrir l’ego plutôt que l’intelligence.

En revanche, adapter, choisir, renoncer parfois, c’est pratiquer un yoga vivant : un yoga qui sert vraiment la santé, la conscience et la profondeur intérieure.


© Jennifer Will — textes & photos : usage réservé


Références

[1] Fischer CS, et al. The neck-shaft angle: an update on reference values and associated factors. Acta Orthop. 2020;91(1):53–57.

[2] Zhang H, et al. Measurement of acetabular orientation using a three-dimensional method. PLoS One. 2017;12(2):e0172292.

[3] Thelen T, et al. Normal reference values and reliability of acetabular cup orientation measurements using a standing radiographic technique (EOS). Orthop Traumatol Surg Res. 2017;103(8):1181–1186.

[4] Gómez-Verdejo F, et al. Femoroacetabular impingement: an update of current evidence. J Hip Preserv Surg. 2024;11(1):1–15.

[5] Soheilipour F, et al. Prevalence of Genu Varum and Genu Valgum in a Selected Sample of Iranian Population. Acta Biomed. 2020;91(3):e2020119.

[6] Katz JN, et al. Diagnosis and Treatment of Hip and Knee Osteoarthritis: A Review. JAMA. 2021;325(6):568–578.

[7] Ward MM. Spondyloarthritis. N Engl J Med. 2019;380:2579–2580.

[8] Strauss ED, et al. Congenital absence of a thoracic pedicle. Spine. 1983;8(7):757–759.

[9] Paul Grilley. Bone Photos. Ressource visuelle éducative (consulté 2025). Disponible : https://paulgrilley.com/bone-photos/